2011-12 Fundraising and Funds Dissemination process/Iberocoop joint statement/fr
Le propos de ce document est de réagir et de faire des observations importantes sur le document intitulé "recommandations à propos de la levée et de la répartition des fonds”, document adressé au conseil d'administration de Wikimedia Foundation et qui concerne Wikimédia en tant que mouvement international.
Iberocoop est un réseau de coopération régionale qui a pour objet de rassembler les chapitres et groupes de travail voulant établir un chapitre en Amérique et dans la péninsule ibérique, promouvant ainsi la collaboration et le partage d’expériences. L'ibéro-amérique constitue une zone stratégique dans laquelle le développement du mouvement wikimédia reste un défi à relever, puisqu’une grande partie des pays concernés fait partie du Global South (pays du Sud). Nous pensons qu’une initiative visant non seulement à établir des chapitres mais aussi des groupes de travail informels nous permettra de surmonter ce défi et nous permettra de propager la culture libre partout.
Notez que même si cette déclaration a été discutée dans Iberocoop, elle relève de la responsabilité exclusive des chapitres et groupes de travail qui l’ont signée. Les noms ci-dessous correspondent à ceux qui ont pris part à son écriture ou à sa relecture.
- Levée et répartition des fonds
Le débat sur la levée et de la répartition des fonds est d’une importance majeure. Nous croyons que la solution consistant à ne réserver cette levée de fond qu’à la Wikimedia Foundation et à l’attribuer sous forme de bourse aux chapitres qui le demandent n’est pas dans l'intérêt du mouvement. Les chapitres sont constitués de volontaires appartenant à la communauté wikimédienne élargie. Ceux-ci promeuvent les projets et la connaissance libre et protègent les marques déposées ; ils devraient être traités comme des partenaires. Or, les déclarations visant à différencier “chapitres” et “communauté” nous inquiètent, car il sont en contradiction avec l’idée que les chapitres sont la meilleure manière d’intégrer les communautés locales à travers un modèle d’organisation officiel, puissant et multiculturel. Les chapitres sont des organisations vivantes avec des membres, des discussions internes et des règles de contrôle internes et externes.
La version de travail actuelle des propositions va à l’encontre de notre vision de l’indépendance des chapitres, alors que celle-ci est vitale pour la durabilité d’un modèle réellement international. Des projets pourtant prioritaires pour les communautés locales et en phase avec la mission peuvent se voir refuser tout financement par la Wikimedia Foundation. Elle enlève également aux donateurs le pouvoir de choisir de faire leur don localement en utilisant les dispositifs propres à leur pays ou une déduction fiscale. Cela freine le développement des chapitres et leur capacité à développer la connaissance libre. Nous considérons que les chapitres ont démontré leur capacité à concevoir et mener à bien des projets et qu’en tant que tels, ils devraient disposer de liberté d’action. Les rendre dépendants de la Wikimedia Foundation va dans le sens opposé.
À ce sujet, nous sommes en accord avec la déclaration de Wikimédia Allemagne. Nous croyons qu’elle développe des arguments sérieux et exhaustifs montrant qu’il est non seulement possible, mais souhaitable, tant pour la Fondation que les chapitres et le mouvement, de permettre aux chapitres de prendre part aux campagnes officielles de levée de fonds.
- À propos des pays en développement (PVD)
En ce qui concerne les PVD nous sommes en accord avec l’engagement de Wikimedia Foundation de développer la présence de Wikimédia dans ce qu’elle nomme le “sud global” ("Global South"). Nous ne sommes par contre pas d'accord avec la méthode utilisée. D’un coté, les modifications dans la levée et de la répartition des fonds sont justifiées par des considérations d’équité globale, mais d’un autre elles posent la question de savoir si les fonds collectés dans ces pays doivent être gérés à partir des pays développés. Nous notons également qu’aucun chapitre des pays du “sud global” n’a exprimé son accord avec de telles pratiques. Pour ce qui nous concerne, nous considérons que la coopération directe entre chapitres est un modèle plus flexible et horizontal que celui qui est actuellement proposé. Au-delà des considérations financières, nous voulons également donner la primauté aux priorités des organisations locales et éviter un management centralisé.
De plus, le système de levée et de répartition des fonds condamne les chapitres et les organisations des PVD à fonctionner à partir de financements provenant des pays du “nord global”, à cause de pratiques bancaires et de contrôle des changes rendant les dons à partir de nos pays plus difficiles. Sur terre, la plupart des hommes n’ont pas de carte de crédit internationale permettant de faire des dons à une organisation étrangère, même une ONG. Seuls des chapitres locaux sont capables de mettre en oeuvre les mécanismes de don adaptés, les chapitres ont l’expertise locale et l’attention des donateurs qui ne peut être facilement reproduite.
Nous ne remettons pas du tout en question le rôle central de Wikimedia Foundation dans la levée et la répartition des fonds, nous ne pensons pas non plus que les bourses ("grants”) soient une mauvaise idée. D’ailleurs, certains chapitres signataires de cette déclaration ne sont actuellement pas capables de lever seuls des fonds. Un programme systématique de bourse pourrait les aider à démarrer leur développement et à prévenir les besoins financiers qu’ils pourraient avoir. Nous sommes également en accord pour développer responsabilité et transparence dans tout le mouvement - chapitres et Foundation compris. Néanmoins, nous pensons que des chapitres ayant prouvé leur sérieux ne devraient pas dépendre uniquement de bourses attribuées de manière centralisée, que ce soit par un département de WMF ou un comité dédié, quoique nous préférons de loin cette dernière option. Nous pensons que le modèle de répartition devrait être suffisamment flexible pour prendre en compte les législations et coutumes locales ; les échanges entre chapitres aiderons aussi à consolider la coopération inter-chapitre. Ce n’est donc pas seulement une question financière mais aussi sur la prise de décision et la construction de l’édifice.
- Une vision d’ensemble
Pour terminer, il faut rappeller que la levée et de la répartition des fonds ne sont que la partie émergée de l’iceberg. C’est avec une grande inquiétude que nous avons vu ces derniers mois un changement important dans l’attitude de la Wikimedia Foundation envers le modèle incluant les chapitres dans l’organisation du mouvement, en particulier les questions posées sur leur représentativité et leur légitimité au sein du mouvement Wikimédia. Les changements promouvant l’autonomie et l’engagement individuels seront in fine néfastes s’ils conduisent à une centralisation des ressources et de la gouvernance. Des groupes informels de partisans de Wikimédia ou des groupes d'intérêt ne doivent pas être mis en concurrence avec des chapitres, comme cela est suggéré par le document de travail sur les rôles et responsabilités dans le mouvement.
Nous y voyons un risque de réduire les prérogatives des chapitres à tel point que seule la Wikimedia Foundation serait en mesure de prendre des décisions, et les chapitres seraient filialisés. Ce qui est proposé dans ce document est à nos yeux, une extinction progressive du rôle des chapitres, et nous souhaiterions que le conseil d’administration de Wikimedia Foundation remette en question cette orientation.
Les changements amorcés vers de nouveaux modèles organisationnels ne devraient pas être mis en oeuvre sur la base exclusive du groupe de travail “Movement Roles”. En effet, ce groupe de travail, “Movement Roles” a été mis en place avant que ne surviennent ces questions et il n’a jamais été débattu et approuvé par toutes les parties prenantes. Nous demandons que la Fondation dissocie cette question de la levée de fond pour éviter que la communauté ne percoive la Fondation comme recherchant d'autres modèles que le modèle “Chapitres” qui fonctionne. La mise en place de nouveaux modèles d’organisation devrait être mise en place d’un commun accord et ne devrait pas démanteler un modèle qui fonctionne sans avoir d’abord établi une alternative préférable et cohérente.
Au-delà des considérations financières, les chapitres wikimédiens ont montré qu’ils étaient un outil puissant de la communauté. Ils ont non seulement géré les relations avec les médias de leur zone géographique, mais ont également été les interlocuteurs de partenaires publics et privés. Ils ont permis des réussites du point de vue de la création de contenus dans les projets tout en canalisant les efforts de la communauté vers les objectifs communs de la Wikimedia Foundation et des chapitres. Quelles que soient les propositions tendant à diversifier les organisations affiliées au mouvement Wikimédia, nous pensons qu’il faut au préalable réaffirmer et préserver le rôle des chapitres et avoir un échange franc et ouvert entre les parties prenantes du mouvement. Ceci ne peut dépendre uniquement de décisions provenant directement de la Wikimedia Foundation ou en particulier de ses salariés.
La construction, la consolidation et la mise en oeuvre de la confiance sera la pierre angulaire permettant de relever ce défi.
- Pour Wikimedia Argentina, Patricio Lorente (Président) & Galileo Vidoni/galio (Vice Président)
- Pour Wikimedia Chile, Osmar Valdebenito/B1mbo (Président) & Juan David Ruiz/Zuirdj (Vice Président)
- Pour Wikimedia España, Jorge Sierra/Lucien leGrey (Président) & María Sefidari/Raystorm (Vice Président)
- Pour Wikimedia Italia, Frieda Brioschi/Frieda (Président) & Cristian Consonni/CristianCantoro (Vice Président)
- Pour Wikimedia México, Iván Martínez/Protoplasma Kid (Coordinateur Général)
- Pour Wikimedia Portugal, Manuel de Sousa (Président) & Béria Lima/Beria (Coordinatrice relations extérieures / Secrétaire au Conseil fiscal)
- Pour Wikimedia Venezuela, Oscar Costero/Oscar . (Président) & Carlos Colina/Jewbask (Trésorier)
- Pour le groupe de travail Wikimedia en Bolivie, Erlan Vega/Alhen & Justine Duranboger (Coordinateurs)